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     « Les mois qui ont suivi la Libération, j’ai essayé de mettre de l’ordre dans ma manière de voir et d’éprouver qu’un peu de sang avait tachée, à mon corps défendant, et je me suis efforcé de séparer les cendres de feu dans le foyer de mon cœur. Ascien, j’ai recherché l’ombre et rétabli la mémoire, celle qui m’était antérieure. Refus de siéger à la cour de justice, refus d’accabler autrui dans le dialogue quotidien retrouvé, décision tenue enfin d’opposer la lucidité au bien-être, l’état naturel aux honneurs, ces mauvais champignons qui prolifèrent dans les crevasses de la sécheresse et dans les lieux avariés, après le premier grain de pluie. (…) Tu le sais, toi, qui demeuras deux ans derrière les barbelés de Linz, imaginant à longueur de journée la dissémination de ton corps en poussière ; toi qui, le soir de ton retour parmi nous, voulus marcher dans les prairies de ton pays, ton chien sur tes talons, plutôt que de répondre à la convocation du commissaire qui désirait mettre devant tes yeux la fiente qui t’avait dénoncé. Tu dis pour t’excuser ce mot étrange : « Puisque je ne suis pas mort, il n’existe pas. » (…)

    Nous sommes partisans, après l’incendie, d’effacer les traces et de murer le labyrinthe. On ne prolonge pas un climat exceptionnel. Nous sommes partisans, après l’incendie, d’effacer les traces, de murer le labyrinthe et de relever le civisme. (…) À mon peu d’enthousiasme pour la vengeance se

    substituait une sorte de d’affolement chaleureux, celui de ne pas perdre un instant essentiel, de rendre sa valeur, en toute hâte, au prodige qu’est la vie humaine dans sa relativité. Oui, remettre sur la pente nécessaire les milliers de ruisseaux qui rafraîchissent et dissipent la fièvre des hommes. (…) »

    R. Char, 4e  billet à Francis Curel, 1948.


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  • R. Char, Feuillets d’Hypnos, 138. 

     Horrible journée ! J’ai assisté, distant de quelque cent mètres, à l’exécution de B. Je n’avais qu’à presser la détente du fusil-mitrailleur et il pouvait être sauvé ! Nous étions sur les hauteurs dominant Céreste, des armes à faire craquer les buissons et au moins égaux en nombre aux SS. Eux ignorant que nous étions là. Aux yeux qui imploraient partout autour de moi le signal d’ouvrir le feu, j’ai répondu non de la tête… le soleil de juin glissait un froid polaire dans mes os.     Il est tombé comme s’il ne distinguait pas ses bourreaux et si léger, il m’a semblé, que le moindre souffle de vent eût dû le soulever de terre.  Je n’ai pas donné le signal parce que ce village devait être épargné à tout prix. Qu’est-ce qu’un village ? Un village pareil à un autre ? Peut-être l’a-t-il su, lui, à cet ultime instant ? 

     
     
     

     

    « Affres, détonation, silence »
    Fureur et mystère (1947), René CHAR

     

    Le Moulin du Calavon. Deux années durant, 
    une ferme de cigales, un château de martinets. Ici
    tout parlait torrent, tantôt par le rire, tantôt par les
    poings de la jeunesse. Aujourd’hui, le vieux
    réfractaire faiblit au milieu des ses pierres, la 
    plupart mortes de gel, de solitude et de chaleur. A 
    leur tour les présages se sont assoupis dans le
    silence des fleurs. Roger Bernard : l’horizon des monstres était
    trop proche de sa terre. 
    Ne cherchez pas dans la montagne ; mais si, à 
    quelques kilomètres de là, dans les gorges d’Oppe-
    dette, vous rencontrez la foudre au visage d’écolier, 
    allez à elle, oh, allez à elle et souriez-lui car elle
    doit avoir faim, faim d’amitié.


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    Extraits des Feuillets d'Hypnos

     

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    Témoignages 

     

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    Une note du cabinet du préfet du Vaucluse, datée du 27 février 1941, montre combien il faisait l’objet d’une surveillance constante ainsi que ses proches :

    « Le jeune Moustrou [neveu de Char] habite avec son père grand mutilé de 1914 et sa mère (née Char) à la villa de sa grand-mère Mme Char, veuve d’un ancien maire de l’Isle. Dans la même villa habitaient jusqu’à ces derniers temps, le professeur Lebouchet et sa femme communistes militants qui ont eu leur changement ; et également jusqu’à ces derniers temps le communiste René Char avec sa femme, juive parisienne, dont les parents juifs sont réfugiés à l’Isle ; actuellement René Char habite la maison des demoiselles Roze impasse de la République à l’Isle toujours. Le communiste René Char est en contact ininterrompu avec les militants communistes de l’Isle, voit journellement Fay, président de l’importante et agissante cellule de l’Isle. » 

     



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    « Nous avons été de toutes les bagarres et ce soir nous filons du côté de Poitiers. Ah ! J’en ai vu de belles ! La lâcheté des uns, la panique des autres, l’absence de toute aviation de soutien, le dénuement complet des armes. Quelle responsabilité pour les démagogues qui nous ont mis là ! Les salauds ces politiciens. Mais le moment n’est pas à gémir. Ne t’inquiète pas, je n’ai pas eu une égratignure. Je sais que j’en sortirai vivant pour après. J’ai tenu dans mes bras des femmes et des enfants ensanglantés, quand terrorisés par les bombes d’avions la plupart de ceux qui devait les secourir

    fuyait. Mais je n’ai pas vu que des lâches. De-ci de-là des HOMMES, les hommes de demain. Mon amour, crois en l’avenir, notre avenir. » 

     



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  • affiche propagande travail famille patrie

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


    affiche propagande revolution nationale

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     



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